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DAZZLED (2021) est une installation collective réalisée par Hélène Bellenger, Valentin Russo et Margot Millet. Cette installation questionne la manière dont les nouvelles technologies et les réseaux sociaux modifient notre rapport au visage, à l’autoportrait et à la représentation de soi en ligne.
Le visage est en effet support privilégié pour comprendre la sensibilité d’une époque et la façon dont elle se réfléchit elle-même, en particulier à travers les portraits, longtemps réservés à une aristocratie, avant l’apparition de la photographie au milieu du XIXe siècle. Des selfies aux filtres de maquillages virtuels en passant par les avatars et les filtres embellissants, les smartphones semblent aujourd’hui avoir « déréalisé » l’espace du visage. Le mythe de Narcisse, obsédé par son propre reflet, en est la preuve : le visage se chosifie et devient une entité autonome, au-delà de soi. Aujourd’hui pixelisés, hyperexposés, médiatisés à outrance, les visages sur écrans semblent répondre à une double contrainte : celle du buzz et d’une pulsion scopique poussée jusqu’à l’ivresse. S’intéresser aux interfaces de l’intime aujourd’hui, c’est donc prendre acte du déplacement du concept d’intimité vers des zones entre-deux. Parce que l’intime se tourne vers le dehors, s’expose dans un jeu de montré-caché, et une volonté de communiquer sur son monde intérieur, les visages apparaissent comme une interface privilégiée pour penser ces rapports. Interface entre le moi et l’autre, l’intime et l’extime, le dedans et le dehors, ils apparaissent comme le lieu d’une intimité médiatisée, liant étroitement ce qu’il y a de plus profond et ce qui affleure à la surface dans le domaine public.
Interpellé·e·s par ces questions, Hélène Bellenger, Margot Millet et Valentin Russo ont initié une collection de selfies. Glanés méticuleusement sur internet et les réseaux sociaux, les selfies avec flash dans le miroir montrent une partie du visage et la font disparaître à la fois. Réunis à la manière d’une constellation de flash ou d’étoiles, ces images noient les individualités de ces autoportraits dans le paterne de ces représentations que l’on trouve par millier sur les réseaux sociaux.
Cette installation photographique est présentée dans le noir à l’image d’un film ou d’un spectacle. Certaines images carrés sont ensuite rehaussées par des petits miroirs, lesquels reflètent la lumière du projecteur et recréent un effet de flash sur le spectateur, qui en devient éblouit lors de la déambulation. Par effet de projection et de miroir, certaines images se retrouvent projetées sur le mur face à elles, laissant toute la pièce s'éclairer comme véritable constellation.
« La comparution, comme concept de l’être-ensemble, consiste donc à s’apparaître tout à la fois à soi et les uns aux autres, dans une même temporalité. C’est pourquoi il ne peut y avoir de « présence nue » de la communauté sans mimesis originaire, c’est-à-dire sans apparences, sans spectacle. » écrit ainsi Marion Zilio.
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Dazzled is a collective installation created by Hélène Bellenger, Valentin Russo and Margot Millet. This installation questions how new technologies and social media are changing our relationship to the face, self-portraiture and self-repre- sentation online.
The face is indeed a privileged medium for understanding the sensitivity of an era and the way it reflects itself, in particular through portraits, long reserved for an aristocracy, before the appearance of photography in the middle of the 19th century. From selfies to virtual make-up filters, including avatars and «beau- tifying » filters, smartphones today seem to have « derealized » the space of the face. The myth of Narcissus, obsessed with its own reflection, is proof of this: the face is objectified and becomes an autonomous entity, beyond itself. Today pixelated, hyperexposed, excessively publicized, the faces on screens seem to respond to a double constraint: that of the buzz and of a scopic drive pushed to the point of intoxication. Being interested in the “interfaces of intimacy” today
is therefore to take note of the displacement of the concept of intimacy towar- ds zones in between. Because the intimate turns outwards, exposes itself in a show-hidden game, and a desire to communicate about its inner world, faces appear as a privileged interface for thinking about these relationships. Interface between the self and the other, the intimate and the « extimate », the inside and the outside, they appear as the place of a mediated intimacy, closely linking what is deepest and what is flush with the surface in the public domain.
Challenged by these questions, Hélène Bellenger, Margot Millet and Valentin Russo initiated a collection of selfies. Meticulously gleaned from the internet and social media, mirror flash selfies show part of the face and make it disappear at the same time. Gathered together like a constellation of flashes (or stars), these images drown the individualities of these self-portraits in the patern of these representations that are found by the thousand on social networks.
This photographic installation is presented in the dark, like a film or a show. Some square images are then enhanced by small mirrors, which reflect the light of the projector and recreate a flash effect on the viewer, who becomes dazzled while wandering around. By projection and mirror effect, some images are projected on the wall in front of them, letting the whole room light up like a real constellation.